Une idée discriminatoire !





Bureau du député de Portneuf et
ministre délégué à la Santé, aux Services sociaux,
à la Protection de la jeunesse et à la Prévention
M. Roger Bertrand

Le projet du chef de l'ADQ, Mario Dumont,
d'instaurer des bons d'étude origine de la droite américaine

 

Pascal Bérubé, président,
Comité national des Jeunes du Parti Québécois,
La Presse, Forum, mercredi 5 juin 2002, p. A19

LE PROGRAMME de l'Action démocratique du Québec (ADQ) propose un nouveau système de financement scolaire. Selon l'ADQ, l'actuel système devrait être troqué pour un principe de bons d'étude remis aux parents. Grâce à ces bons, les parents seraient ainsi en mesure d'envoyer leur enfant dans l'école de leur choix; le financement gouvernemental pour les institutions scolaires serait en conséquence proportionnel au nombre de bons recueillis par chaque école. Aux dires de Mario Dumont, ce système introduirait "une sorte de loi de l'offre et de la demande", ce qui entraînerait une "véritable démocratisation du système d'éducation". Cette proposition n'est pas exclusive à l'ADQ puisque l'idée même des bons d'étude origine de la droite américaine; l'actuel président des États-Unis, George W. Bush, tente ainsi de faire officialiser cette mesure au Congrès américain, bien que la Cour suprême doit statuer sur la constitutionnalité d'un tel concept.

Pour le Comité national des jeunes du Parti québécois (CNJPQ), une telle proposition comporte un nombre important de corollaires qui pourraient, à long terme, être néfastes à l'endroit de notre système d'éducation. Rappelons en effet que le principe des bons d'étude repose essentiellement sur l'offre et la demande. Or, pour le Parti québécois, il ne fait aucun doute que l'ensemble de nos services sociaux ne doit pas être soumis au principe de l'offre et de la demande. C'est cela qui nous garantit des services de qualité pour toutes et tous.

Un principe discriminatoire

De tels bons d'étude entraîneraient un déséquilibre entre les écoles des quartiers défavorisés et celles implantées en milieux plus riches. En effet, les écoles publiques de milieux plus pauvres risqueraient d'obtenir de moins en moins d'inscriptions. Or, si leur financement dépend du nombre de bons d'étude recueillis, le budget de ces écoles diminuera de manière radicale. Pour le CNJPQ, un tel principe ne relève en aucun temps d'une plus grande démocratisation de notre système d'éducation. L'exemple des États-Unis est à ce sujet probant: le système fonctionne aisément dans les quartiers plus riches, mais le concept connaît d'importants ratés dans les écoles des quartiers défavorisés.

Écoles privées c. écoles publiques

Selon les adéquistes, il serait en outre possible d'employer ces bons d'étude afin d'épancher quelque peu les frais de scolarité des institutions privées. Si cela peut paraître aux premiers abords bénéfiques, il ne faut pas négliger le fait que cela équivaut à retrancher encore plus d'argent du secteur public pour le réinvestir dans le domaine privé. Ici encore, l'aspect de démocratisation d'un tel concept reste discutable.

Ce système est de plus inapplicable à l'endroit des régions. En effet, l'éloignement relatif des institutions scolaires en région rend caducs les avantages apparents des bons d'étude. Les parents qui utiliseront ces bons pour envoyer leurs enfants à l'école privée devront tout de même s'acquitter des frais encourus par l'éloignement de ces institutions privées.

Pour le CNJPQ, les bons d'étude représentent un principe dangereux parce qu'ils engendrent un système d'éducation à deux vitesses. Et est-ce cela la véritable démocratie sociale? En ce début de nouveau millénaire où les lois du marché occupent une place de plus en plus prépondérante, il est impératif que le Québec continue de s'affirmer comme nation sociale-démocrate. L'école est un bien public; nous ne devons en aucun temps troquer ce principe pour un système discriminatoire qui favorise le privé au détriment d'une éducation de qualité, accessible à l'ensemble des citoyennes et citoyens du Québec.