Lettre ouverte





Bureau du député de Portneuf et
ministre délégué à la Santé, aux Services sociaux,
à la Protection de la jeunesse et à la Prévention
M. Roger Bertrand

Minute, monsieur Dumont !
Des CPE gérés pour les parents par les parents

 

Guy Côté, Président du Conseil d'administration
Centre de la petite enfance Le Kangourou
Pont-Rouge

Le Soleil, 16 mai 2002 - Récemment, M. Mario Dumont, député de Rivière-du-Loup et chef de l'ADQ, faisait une sortie en règle contre le réseau actuel des Centres de la petite enfance (CPE). Dans le cadre d'une entrevue au journal LE SOLEIL, Mario Dumont parlait de monopole d'État, de nationalisation des enfants et de la mainmise de la CSN sur une majorité d'éducatrices et d'éducateurs en garderie. Manifestement, M. Dumont ne connaît rien aux Centres de la petite enfance.

Mon épouse et moi avons la chance d'avoir trois merveilleux enfants. Je siège au sein du conseil d'administration du Centre de la petite enfance Le Kangourou depuis 1995. De plus, mon épouse possède une douzaine d'années d'expérience comme éducatrice en garderie. Nous avons donc vécu de près la transformation du réseau.

Rappelons la situation qui prévalait avant l'arrivée des Centres de la petite enfance. Envoyer son enfant à la garderie coûtait aux alentours de 20 $ par jour. Il existait à ce moment un programme permettant aux parents à plus faible revenu de bénéficier d'une réduction de ce tarif. À la fin de l'année, des reçus d'impôt étaient émis et, souvent, nous permettaient de récupérer une bonne partie du montant payé grâce à un retour d'impôt. Pour les besoins de l'exemple, j'utiliserai ma situation à cette période, soit 1997.

Jeune couple, trois enfants entre un et quatre ans donc tous à la garderie. Nous bénéficions de la réduction de tarif. Il nous en coûtait donc environ 10 $ par jour par enfant : 30 % du revenu hebdomadaire net. C'est bien beau, les retours d'impôts, mais ça ne paie pas l'épicerie de la semaine ! À cette période, une éducatrice en garderie avec huit ans d'expérience gagnait autour de 9 $ l'heure dans une garderie à but non lucratif gérée par les parents et dans un milieu non syndiqué.

Arrive l'implantation du réseau des Centres de la petite enfance. Tarification à 5 $ par enfant par jour. Une réduction des frais qui permet de mieux équilibrer notre budget. Rattrapage salarial des employés. Mon épouse a enfin un revenu qui correspond à son expérience et ses compétences.

Les CPE, un monopole d'État ? Les CPE sont régis par le ministère de la Famille et de l'Enfance. Les garderies l'étaient avant. Les CPE sont subventionnés, les garderies l'étaient aussi dans une moindre mesure. De plus, comme avant, les CPE sont gérés par une majorité de parents utilisateurs. Chaque CPE peut et doit offrir des services adaptés à ses utilisateurs. Certains offrent des services de garde le soir ou la nuit, d'autres ont des programmes particuliers. Afin de répondre à l'appellation Centre de la petite enfance, une garderie ou un milieu familial de garde doit répondre à un certain nombre de critères. Rien n'empêche toutefois des personnes compétentes d'offrir des services de garde et d'émettre par la suite les reçus d'impôts appropriés. Il n'y a pas de monopole. Il y a des services régis et d'autres non régis.

Est-ce que le système est parfait ? Non. Le réseau est victime de sa réussite. Ce qu'on appelle les places à 5 $ ont créé une demande gigantesque dans le réseau. Les listes d'attente sont longues. Il importe toutefois de signaler que nombreux sont les parents inscrivant les enfants sur plusieurs listes et qu'une fois la place trouvée, rares sont ceux qui communiquent avec les CPE pour retirer l'enfant de la liste d'attente, même si le besoin est comblé.

La CSN contrôle les garderies ? Au Québec, il y a 23 000 travailleurs dans les Centres de la petite enfance. Seulement 4000 à 5000 sont syndiqués. De plus, l'amélioration des conditions salariales des employées, en très grande majorité féminines, ne devrait pas pousser les travailleuses vers une syndicalisation massive. Est-ce que tout est parfait ? Non. Le rattrapage salarial doit continuer. Bien que lent, le processus visant à établir un fonds de retraite a débuté. Les conseils d'administration des différents CPE sont sensibles à ces questions. Tous nous voulons des gens heureux, nous leur prêtons notre bien le plus précieux, nos enfants.

Est-ce que tout est parfait dans le réseau ? Non. Ce système de garde est-il meilleur que le précédent ? Oui, sans l'ombre d'un doute. Peut-il être amélioré ? Oui. Les affirmations mises de l'avant par M. Dumont sont-elles justes et améliorent-elles les services offerts aux parents pour la garde de leurs enfants ? La réponse aux deux dernières questions est un NON catégorique.

Sans doute M. Dumont n'utilise-t-il pas les services offerts par un des Centres de la petite enfance de sa circonscription. Excusons-le pour sa méconnaissance du dossier, mais rétablissons les faits.

-30-

COMMENTAIRES ?