Communication





Bureau du député de Portneuf et
président de la Commission des institutions
M. Roger Bertrand

 



Réunion de la commission politique
Paris, 25-26 janvier 2002

M. Roger Bertrand
(Québec)

Rapporteur

Le suivi du Plan d’action du Sommet de Beyrouth



Paris, le 25 janvier 2002 - Les terribles attentats du 11 septembre aux Etats-Unis et l'onde de choc qui s'en est suivie sur la scène internationale ont pesé sur la décision de reporter d'un an le Sommet de la Francophonie qui devait avoir lieu à Beyrouth à la fin octobre 2001.

Le Secrétaire général de la Francophonie, M. Boutros Boutros-Ghali, publiait le 8 octobre, le lendemain du début de l'intervention militaire américaine en Afghanistan, un communiqué annonçant ce report et réaffirmant la volonté de la Francophonie de tenir le Sommet à Beyrouth, à l'automne 2002.

Ce report entraîne des conséquences importantes sur le fonctionnement institutionnel de la Francophonie, habituellement ponctué par la réunion tous les deux ans des chefs d'Etat et de gouvernement. La première question soulevée par cette situation exceptionnelle concerne la poursuite des actions de la Francophonie pour l'année 2002, voire pour l'ensemble du biennum 2002-2003.

Lors de chaque Sommet depuis Hanoi en 1997, les chefs d'État et de gouvernement de la Francophonie consignent dans un Plan d'action les orientations de la coopération multilatérale francophone pour une période de deux ans. Ce cadre de référence a alors, au cours d'un biennum, force de loi pour l'Agence intergouvernementale de la Francophonie (AIF) et pour les autres opérateurs directs de la Francophonie qui sont chargés de son exécution.

De plus, durant le Sommet, les États et gouvernements annoncent les montants des contributions financières qu'ils entendent allouer pour répondre aux priorités du Plan d'action qu'ils ont adopté. Ces contributions sont recueillies dans le Fonds multilatéral unique (FMU).

Par la suite, quelques semaines plus tard, lors de la Conférence ministérielle qui suit le Sommet, le Secrétaire général présente les grands axes de la programmation des opérateurs, reflétant les priorités inscrites dans le Plan d'action. A cette occasion, il propose également la répartition du Fonds multilatéral unique qui servira à financer la coopération multilatérale francophone au cours du biennum.

Selon le fonctionnement institutionnel actuel, avec le renvoi du Sommet, il faudrait attendre pendant un an l'adoption officielle du Plan d'action de Beyrouth par les chefs d'Etat et de gouvernement avant de préparer et de mettre en oeuvre la programmation de la Francophonie pour le biennum. Cette situation pénaliserait l'ensemble de l'espace francophone.

Dans un souci de pragmatisme et de continuité, les instances de la Francophonie ont donc mis en place une série de mesures conservatoires de manière à pouvoir faire face à ces circonstances inédites. Il a d'abord été demandé aux opérateurs de préparer leur projet de programmation pour le biennum 2002-2003 en prenant en compte les grandes orientations contenues dans le projet de Plan d'action de Beyrouth.

Ce document, élaboré par le comité ad hoc de rédaction des documents du Sommet, a été présenté le 24 septembre 2001 au Conseil permanent de la Francophonie. N'ayant pas suscité de commentaires particuliers de la part des représentants personnels des chefs d'Etat et de gouvernement à cette occasion, on a considéré que le document avait franchi là une première étape de validation officielle et qu'il pouvait servir de base de travail pour les opérateurs.

Ainsi, lors des réunions du Conseil permanent de la Francophonie (CPF) et de la Conférence ministérielle de la Francophonie (CMF), tenues à Paris les 9, 10 et 11 janvier 2002, l'AIF et les autres opérateurs ont soumis leur programmation à l'approbation de ces deux instances et les grands axes de la coopération multilatérale pour le biennum ont ainsi été adoptés. La programmation 2002-2003 de la Francophonie pourra donc commencer à être mise en oeuvre à peu près dans les temps, sans que le Sommet n'ait eu lieu.

Lorsqu'ils se réuniront à Beyrouth, les chefs d'État et de gouvernement adopteront le Plan d'action, valideront les actions engagées en 2002. De plus, si ces actions correspondent aux orientations adoptées pour 2003 et compte tenu des moyens qui seront effectivement mobilisables à leur réalisation, ils confirmeront les actions à engager en 2003.

Un premier examen de ce projet de Plan d'action nous permet de constater que les deux premiers axes mobilisateurs sont plus denses et davantage détaillés en sous-thèmes. Ils recouvrent en fait les priorités dégagées lors des deux grandes conférences ministérielles qui se sont déroulées pendant le biennum 2000-2001 : la IIIe Conférence ministérielle de la Francophonie sur la culture qui a permis l'adoption de la Déclaration et du Plan d'action de Cotonou et le Symposium international sur le bilan des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l'espace francophone qui a débouché sur l'adoption de la Déclaration de Bamako.

Ainsi, l'axe mobilisateur n° 1 reprend presque en entier, en les résumant, les démarches proposées dans le Plan d'action de Cotonou. De la même manière, les principales initiatives du Plan d'action de Bamako se retrouvent dans les trois dernières parties de l'axe mobilisateur n°2.

Le premier axe mobilisateur du plan d'action de Beyrouth qui porte sur la Promotion de la Diversité culturelle et linguistique reprend la plupart des conclusions du Plan d'action de la IIIe Conférence ministérielle de la Francophonie sur la culture (Cotonou, 14-15 juin 2001).

Le troisième avis de l'APF, présenté lors de la CMF de janvier 2002, porte sur le thème du Sommet de Beyrouth qui est le dialogue des cultures. Cet avis comporte pour la première fois une section sur le suivi du Plan d'action d'un Sommet dont l'objectif est d'exercer un certain contrôle parlementaire au sein de la Francophonie.

Nous avons entrepris une surveillance sélective des ressources octroyées et des priorités retenues lors des Sommets. Nous avons mis en perspective le thème et certains objectifs du Sommet de Moncton et les moyens mis en oeuvre pour les réaliser à partir du Plan d'action, de la programmation et des échéanciers. Nous souhaitions, dans un premier temps, nous assurer que les Plans d'action élaborés par les Sommets étaient mis en oeuvre et exécutés dans les délais requis.

Deux commissions de l'APF ont participé à cet effort de réflexion et de rédaction: la Commission politique en ce qui concerne le suivi du Plan d'action de Moncton et la Commission de l'éducation, de la communication et des affaires culturelles pour ce qui est du dialogue des cultures. Il est cependant nécessaire pour les parlementaires d'exercer un contrôle parlementaire encore plus efficace sur les institutions de la Francophonie.

En effet, outre les dimensions de la mission fondamentale de l'APF que sont la coopération interparlementaire, celle de l'action politique et celle de prendre position sur diverses questions d'intérêt public, c'est assurément le contrôle parlementaire qui mériterait d'être développé davantage. Pour le citoyen, le contrôle parlementaire constitue une réelle valeur ajoutée. Il permet d'empêcher et même de prévenir les erreurs administratives et les abus de pouvoir, d'éviter le gaspillage des fonds publics, d'amener les institutions de l'exécutif à bien préciser ses cibles et à mieux répondre aux attentes des citoyens.

L'APF pourrait exercer une surveillance plus élargie et pointue des engagements pris par les Chefs d'État et de gouvernement de la Francophonie par l'implication de chacune des commissions de l'APF dans le processus de suivi et de préparation des Sommets. Cette contribution supplémentaire des commissions permettrait d'élargir la portée du suivi des Plans d'action, d'approfondir l'analyse de la programmation de l'AIF et d'étendre ce suivi aux autres institutions de la Francophonie.

Il serait également souhaitable de solliciter la participation du plus grand nombre possible de parlementaires lors de la rédaction des avis de l'APF sur le thème des Sommets. Nous ne pourrons exercer un véritable contrôle parlementaire sans la revitalisation du travail des commissions au sein même de l'APF.

La section du dernier avis de l'APF qui portait sur l'analyse du Plan d'action de Moncton représentait un premier pas de notre démarche de contrôle parlementaire. Cette section se subdivisait en deux parties avec une présentation générale du Plan d'action de Moncton et un compte-rendu de la prise en compte des recommandations de l'avis de l'APF.

Dans le cadre de la préparation du prochain avis, nous souhaitons pousser un peu plus loin cette démarche en présentant nos positions sur le contenu des différents axes du Plan d'action de Beyrouth. Les axes mobilisateurs du projet de Plan d'action de Beyrouth pourraient ainsi être répartis entre les commissions selon leurs attributions définies dans le règlement de l'APF. Nous sollicitons ici l'apport des autres commissions afin d'améliorer le suivi du Plan d'action de Beyrouth.

Par exemple, la Commission de l'éducation, de la communication et des affaires culturelles de l'APF pourrait se prononcer sur le contenu du premier axe mobilisateur du Plan d'action de Beyrouth: Promotion de la diversité culturelle et linguistique. Dans ce cas, il s'agit surtout de voir si les recommandations formulées dans le dernier Avis de l'APF sur le dialogue des cultures s'y retrouvent.

Il faut élargir la portée du contrôle parlementaire au sein de la Francophonie afin d'inclure, outre l'analyse des actions politiques réalisées par le Secrétaire général de l'OIF et l'analyse de la programmation de l'AIF, les autres opérateurs directs tels que l'Agence universitaire de la francophonie (AUF), TV5, l'Université Senghor, l'Association internationale des maires francophones.

Les commissions de l'APF peuvent aussi s'impliquer dans l'analyse, l'évaluation et la progression des travaux et des décisions des différentes conférences ministérielles, celles entre autres des ministres de l'Éducation, de la Jeunesse et des Sports, de la Justice, de la Culture, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, et depuis peu, des ministres de l'Économie.

Les résolutions adoptées par la CMF et la CPF devraient faire l'objet d'une attention particulière, notamment lorsqu'elles concernent la situation politique des membres de l'OIF.

Comme les commissions seront impliquées dans le suivi et la préparation des Sommets, elles seront en mesure de questionner le Secrétaire général de l'OIF et l'administrateur général de l'AIF avec plus de rigueur.

Il faut réitérer à la suite de chacun des Sommets notre désir d'obtenir les comptes-rendus d'exécution de la programmation et le rapport intermédiaire du Secrétaire général de l'OIF. La transmission du rapport intermédiaire sur les actions des opérateurs depuis le Sommet de Moncton démontre bien l'importance qu'accorde le Secrétaire général de l'OIF au dialogue et aux échanges au sein de la Francophonie.

Nous devons maintenant envisager d'envoyer des questions écrites au Secrétaire général de l'OIF avec l'apport de chacun des commissions. Cette procédure permettrait de poser des questions plus précises et d'obtenir des réponses plus détaillées. Les commissions permanentes pourront ainsi devenir le principal lieu d'interface entre les parlementaires et les citoyens de la Francophonie.

Je suggère enfin que chaque commission ait sa propre page web à l'intérieur du site de l'APF. Les commissions auraient la possibilité d'attirer l'attention des internautes sur certains mandats, de mettre en valeur leurs rapports, de créer des liens avec d'autres sites. Nous avons la chance aujourd'hui d'expérimenter de nouvelles formes d'interaction avec les citoyens et les groupes en créant, par exemple, des forums de discussion reliés à des mandats particuliers. Cela donnerait un nouveau moyen aux citoyens francophones de participer au débat parlementaire tout en procurant aux commissions un outil de consultation supplémentaire.

L'analyse du Plan d'action, des programmations et des rapports d'activités des différents opérateurs sans oublier l'envoi de questions écrites et l'audition des dirigeants sont donc quelques outils à la disposition des rapporteurs des commissions de l'APF.

Nous sommes en droit de nous poser certaines questions sur la coordination de ce suivi. Chaque commission conserve bien sûr la liberté de choisir les sujets de son choix. Nous gagnerions en crédibilité et en notoriété si chacune des commissions s'impliquait dans cet important processus de contrôle parlementaire. Nous appelons donc les Présidents des commissions à se concerter et à réfléchir sur les moyens d'améliorer notre rôle d'instance consultative au sein de la famille francophone.

Cette stratégie d'interaction serait bien incomplète si elle n'intégrait une dynamique de sensibilisation des pouvoirs législatifs et exécutifs dans chacune des sections de l'APF. En effet, à titre de parlementaires francophones, il faut nous engager à saisir régulièrement nos collègues et nos assemblées de nos travaux, de nos actions et de nos prises de position afin que dans l'avenir, l'interface se fasse non seulement avec nos Chefs d'État et de gouvernement via le Sommet, mais également avec les parlements de la Francophonie via, par exemple, des organes permanents de nos assemblées parlementaires comme les commissions permanentes ou les comités pléniers.

Il faut également nous engager à faire pression, chacun dans nos sections, pour sensibiliser systématiquement les ministres sectoriels sur les problématiques identifiées et les solutions proposées par l'APF.